Eclypsia, l’histoire contrariée d’une pépinière du streaming français


Des adieux furtifs et un ultime écran noir. En avril 2018, le paysage français du streaming perd l’un de ses pionniers : après six ans d’existence et des derniers instants chaotiques, la très populaire Web TV Eclypsia ferme ses portes. La société est placée en liquidation judiciaire deux ans plus tard, après un temps à officier sous la forme d’un site d’information sur le jeu vidéo.

ZeratoR, Kameto, Jeel, Ponce… Forte d’une renommée impressionnante dans les années 2010, Eclypsia a vu passer nombre de vidéastes aujourd’hui célèbres sur la plate-forme Twitch. Surtout, ce projet a été, dans un secteur où tout était à inventer, le théâtre de premières expérimentations en matière de contenus divertissants en direct, de modèles économiques et de professionnalisation. Si l’écosystème du streaming s’est désormais détourné du modèle des Web TV collectives, authentique exception française, les streameurs et les spectateurs font encore régulièrement appel aux souvenirs, précurseurs bien qu’ambivalents, d’Eclypsia.

Désormais à la tête de l’équipe e-sportive Karmine Corp, le streameur Kameto (à gauche) a aussi fait ses armes chez Eclypsia. Il est ici sur la scène de l’Occitan Championship Series à Toulouse, en 2016, en compagnie de l’animateur Olivier Morin.

« Les meilleurs concepts, les meilleurs streameurs »

Nous sommes à la fin de l’année 2011 : la plate-forme Twitch croît lentement dans l’ombre de son parent Justin.tv et, en France, Dailymotion peut encore rivaliser avec la montée en puissance de YouTube. Seuls quelques quidams, motivés bien davantage par la passion que par l’appât d’un hypothétique et maigre gain, diffusent en direct leurs parties de jeux en ligne. Agé d’à peine 25 ans, Julien Thierry gère quant à lui plusieurs affaires à l’étranger dans le secteur de l’affiliation en ligne et cherche, en tant qu’amateur de la licence Starcraft, à investir dans le streaming de jeu vidéo. Après avoir échoué à racheter Millenium, une structure montée en 2002 et rassemblant joueurs professionnels, vidéastes et rédacteurs Web, il lance Eclypsia à Bordeaux, le 1er avril 2012.

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Sur son site Internet, Eclypsia affichait chaque semaine une nouvelle programmation, ici en novembre 2013.

« C’était comme une colonie de vacances », se souvient dans un sourire celui qui s’est aujourd’hui éloigné du monde de l’influence. A l’époque, il souhaite capitaliser sur l’idée d’un collectif de vedettes qui se relaient pour assurer une programmation divertissante en direct : l’un s’occupe du créneau du déjeuner, remplacé dès 14 heures par un de ses collègues, avant qu’une émission de discussion en plateau, rassemblant quelques individualités, se joue en prime time, à 20 heures.

Avec les premiers pas d’Eclypsia, c’est le début des lives produits – techniciens et caméras à l’appui – et l’arrivée de moyens presque anachroniques pour une industrie aussi balbutiante. « En dehors des compétitions d’e-sport, on a été les premiers au monde à streamer cinq ordinateurs en même temps », avance Julien Thierry.

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